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disposition de la loi Voconienne : et il est remarquable qu'on n'abandonna pas entièrement l'esprit de cette loi. Par exemple, la loi pappienne (a) permettait à un homme qui avait un enfant (b) de recevoir toute l'hérédité par le testament d'un étranger; elle n'accordait la même grâce à la femme que lorsqu'elle avait trois enfans (c).

Il faut remarquer que la loi pappienne ne rendit les femmes qui avaient trois enfans capables de succéder qu'en vertu du testament des étrangers; et qu'à l'égard de la succession des parens, elle laissa les anciennes lois et la loi Voconienne (d) dans toute la force. Mais cela ne subsista pas.

Rome, abimée par les richesses de toutes les nations, avait changé de mours; il ne fut plus question d'arrêter le luxe des femmes. AuluGelle, qui vivait sous Adrien (e), nous dit que de son temps la loi Voconienne était presque

(a) La même différence se trouve dans plusieurs dispositions de la loi pappienne. Voyez les Fragm. d'Ulpien, § 4 et 5, tit. dernier; et le même, au même tit. § 6.

(b) Quod tibi filiolus, vel filia, nascitur ex me,

Jura parentis habes; propter me scriberis hæres.

JUVENAL, sat. IX.

(c) Voyez la loi IX, Cod. Théod. DE BONIS PROSCRIPTORUM ; et Dion, liv. LV. Voyez les Fragm. d'Ulpien, tit. dern. § 6; et tit. 29, § 3.

(d) Fragm. d'Ulpien, tit XVI, § 1; Sozomène, liv. I, chapitre xix. - (e) Liv. XX, chap. 1.

anéantie; elle fut couverte par l'opulence de la cité. Aussi trouvons-nous dans les Sentences de Paul(a), qui vivait sous Niger, et dans les Fragmens d'Ulpien (b), qui était du temps d'Alexandre Sévère, que les sœurs du côté du père pouvaient succéder, et qu'il n'y avait que les parens d'un degré plus éloigné qui fussent dans le cas de la prohibition de la loi Voconienne.

Les anciennes lois de Rome avaient commencé à paraître dures; et les préteurs ne furent plus touchés que des raisons d'équité, de modération et de bienséance.

Nous avons vu que, par les anciennes lois de Rome, les mères n'avaient point de part à la succession de leurs enfans. La loi Voconienne fut une nouvelle raison pour les en exclure. Mais l'empereur Claude donna à la mère la succession de ses enfans, comme une consolation de leur perte; le sénatus-consulte Tertulien, fait sous. Adrien (c), la leur donna lorsqu'elles avaient trois enfans si elles étaient ingénues, ou quatre si elles étaient affranchies. Il est clair que ce sénatusconsulte n'était qu'une extension de la loi pap pienne, qui, dans le même cas, avait accordé aux femmes les successions qui leur étaient déférées par les étrangers. Enfin Justinien (d) leur

(a) Liv. IV, tit VIII, § 3. — (b) Tit. XXVI, § 6.

(c) C'est-à-dire l'empereur Pie, qui prit le nom d'Adrien par adoption, (d) Leg. II, Cod. DE JURE LIBERORUM, Instituí., lib. III, tit. III, § 4. DE SENATUS-CONSULT. TEATUL.

accorda la succession indépendamment du nombre de leurs enfans.

Les mêmes causes qui firent restreindre la loi qui empêchait les femmes de succéder firent renverser peu à peu celle qui avait gêné la succession des parens par femmes. Ces lois étaient trèsconformes à l'esprit d'une bonne république, où l'on doit faire en sorte que ce sexe ne puisse se prévaloir pour le luxe, ni de ses richesses, ni de l'espérance de ses richesses : au contraire, le luxe d'une monarchie rendant le mariage à charge et coûteux, il faut y être invité et par les richesses que les femmes peuvent donner et par l'espérance des, successions qu'elles peuvent procurer. Ainsi, lorsque la monarchie s'établit à Rome, tout le système fut changé sur les successions les préteurs appelèrent les parens par femmes au défaut des parens par mâles; au lieu que, par les anciennes lois, les parens par femmes n'étaient ja-... mais appelés. Le sénatus-consulte Orphitien appela les enfans à la succession de leur mère; et les empereurs Valentinien (a), Théodose et Arcadius, appelèrent les petits-enfans par la fille à la succession du grand-père. Enfin l'empereur Justinien (b) ôta jusqu'au moindre vestige du droit ancien sur les successions: il établit trois ordres d'héritiers; les descendans, les ascendans, les collatéraux sans aucune distinction entre les

(a) Leg. IV. Cod. DE SUIS ET LEGITIMIS LIBERIS.

:

(b) Leg. XII, Cod. ibid., et les Novelles CXVIII et CXXVII.

mâles et les femelles; entre les parens par femmes et par les parens par mâles, et abrogea toutes celles qui restaient à cet égard. Il crut suivre la nature même en s'écartant de ce qu'il appela les emburras de l'ancienne jurisprudence.

LIVRE VINGT-HUITIÈME.

DE L'ORIGINE ET DES RÉVOLUTIONS DES LOIS CIVILES CHEZ LES FRANÇAIS.

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Les Francs étant sortis de leur pays, ils firent rédiger (a) parles sages de leur nation les lois saliques.. La tribu des Francs ripuaires s'étant jointe, sous Clovis (b), à celle des Francs saliens, elle conserva ses usages; et Théodoric (e), roi d'Austrasie, les fit mettre par écrit. Il recueillit (d) de même les usages des Bavarois et des Allemands qui dépendaient de son royaume; car, la Germanie étant affaiblie par la sortie de tant de

peu

(a) Voyez le prologue de la loi salique. M. de Leibnitz dit, dans son Traité de l'origine des Francs, que cette loi fut faite avant le règne de Clovis : mais elle ne put l'être avant que les Francs fussent sortis de la Germanie; ils n'entendaient pas pour lors la langue latine.

(b) Voyez Grégoire de Tours.

(c) Voyez le prologue de la loi des Bavarois, et celui de la loi salique. (d) Ibid.

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