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PQ 2011

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1835

v. 5

IMDIVMY OMIA

TIBEVBA

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Je le dis, et il me semble que je n'ai fait cet ouvrage que pour le prouver : l'esprit de modération doit être celui du législateur; le bien politique, comme le bien moral, se trouve toujours entre deux limites. En voici un exemple.

Les formalités de la justice sont nécessaires à la liberté. Mais le nombre en pourroit être si grand qu'il choqueroit le but des lois mêmes qui les auroient établies; les affaires n'auroient point de fin; la propriété des biens resteroit incertaine; on donneroit à l'une des parties le bien de l'autre sans examen, ou on les ruineroit toutes les deux à force d'examiner.

Les citoyens perdroient leur liberté et leur sûreté; les accusateurs n'auroient plus les moyens de convaincre, ni les accusés le moyen de se justifier.

DE L'ESPRIT DES LOIS. T. III.

I

CHAPITRE II.

Continuation du même sujet.

Cécilius, dans Aulu-Gelle 1, discourant sur la loi des douze tables qui permettoit au créancier de couper en morceaux le débiteur insolvable, la justifie par son atrocité même, qui empêchoit qu'on n'empruntât au delà de ses facultés. Les lois les plus cruelles seront donc les meilleures. Le bien sera l'excès; et tous les rapports des choses seront détruits.

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CHAPITRE III.

Que les lois qui paroissent s'éloigner des vues du législateur y sont souvent conformes.

La loi de Solon, qui déclaroit infames tous ceux qui dans une sédition ne prendroient aucun parti, a paru bien extraordinaire : mais il faut faire attention aux circonstances dans lesquelles la Grèce se trouvoit pour lors. Elle étoit partagée en de

* Liv. xx, chap. 1.

⚫ Cécilius dit qu'il n'a jamais vu ni lu que cette peine eût été infligée; mais il y a apparence qu'elle n'a jamais eté établie. L'opinion de quelques jurisconsultes, que la loi des douze tables ne parloit que de la division du prix du débiteur vendu, est très vraisemblable..

très petits états: il étoit à craindre que, dans une république travaillée par des dissensions civiles, les gens les plus prudents ne se missent à couvert, et que par là les choses ne fussent portées à l'extrémité.

Dans les séditions qui arrivoient dans ces petits états, le gros de la cité entroit dans la querelle ou la faisoit. Dans nos grandes monarchies, les partis sont formés par peu de gens, et le peuple voudroit vivre dans l'inaction. Dans ce cas, il est naturel de rappeler les séditieux au gros des citoyens, non pas le gros des citoyens aux séditieux; dans l'autre, il faut faire rentrer le petit nombre de gens sages et tranquilles parmi les séditieux : c'est ainsi que la fermentation d'une liqueur peut être arrêtée par une seule goutte d'une autre.

Il

CHAPITRE IV.

Des lois qui choquent les vues du législateur.

y a des lois que le législateur a si peu connues, qu'elles sont contraires au but même qu'il s'est proposé. Ceux qui ont établi chez les François que, lorsqu'un des deux prétendants à un bénéfice meurt, le bénéfice reste à celui qui survit, ont cherché sans doute à éteindre les affaires : mais il en résulte un effet contraire; on voit les ecclésias

tiques s'attaquer et se battre, comme des dogues anglois, jusqu'à la mort.

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CHAPITRE V.

Continuation du même sujet.

I

La loi dont je vais parler se trouve dans ce serment qui nous a été conservé par Eschines 1: « Je jure que je ne détruirai jamais une ville des Amphictyons, et que je ne détournerai point ses <«< eaux courantes; si quelque peuple ose faire quelque chose de pareil, je lui déclarerai la « guerre, et je détruirai ses villes. » Le dernier ar ticle de cette loi, qui paroît confirmer le premier, lui est réellement contraire. Amphictyon veut qu'on ne détruise jamais les villes grecques, et sa loi ouvre la porte à la destruction de ces villes. Pour établir un bon droit des gens parmi les Grecs, il falloit les accoutumer à penser que c'étoit une chose atroce de détruire une ville grecque; il ne devoit pas même détruire les destructeurs. La loi d'Amphictyon étoit juste, mais elle n'étoit pas prudente; cela se prouve par l'abus même que l'on en fit. Philippe ne se fit-il pas donner le pouvoir de détruire les villes, sous prétexte qu'elles avoient violé les lois des Grecs? Amphictyon auroit pu • De falsa legatione.

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