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«< ce qu'ils avancent est écrit, et que même plu<< sieurs d'entre eux l'avoient entendu raconter à « Louis-le-Débonnaire, père des deux rois. >>

Le règlement du roi Pepin dont parlent les évêques fut fait dans le concile tenu à Leptines'. L'église y trouvoit cet avantage, que ceux qui avoient reçu de ces biens ne les tenoient plus que d'une manière précaire; et que d'ailleurs elle en recevoit la dîme, et douze deniers pour chaque case qui lui avoit appartenu. Mais c'étoit un remède palliatif, et le mal restoit toujours

Cela même trouva de la contradiction; et Pepin fut obligé de faire un autre capitulaire', où il enjoignit à ceux qui tenoient de ces bénéfices de payer cette dîme et cette redevance, et même d'entretenir les maisons de l'évêché ou du monastère, sous peine de perdre les biens donnés. Charlemagne renouvela les règlements de Pepin3. Ce que les évêques disent dans la même lettre, que Charlemagne promit, pour lui et ses successeurs, de ne plus partager les biens des églises aux gens de guerre, est conforme au capitulaire

L'an 743. Voyez le liv. v des capitulaires, art. 3, édit. de Baluze,

p. 825.

2 Celui de Metz, de l'an 756, art. 4.

Voyez son capitulaire de l'an 803, donné à Worms, édit. de Baluze, p. 411, où il règle le contrat précaire; et celui de Francfort, de l'an 794, p. 267, art. 24, sur les réparations des maisons; et celui de l'an 800, p. 330.

de ce prince, donné à Aix-la-Chapelle l'an 803, fait pour calmer les terreurs des ecclésiastiques à cet égard: mais les donations déjà faites subsistèrent toujours '. Les évêques ajoutent, et avec raison, que Louis-le-Débonnaire suivit la conduite de Charlemagne, et ne donna point les biens de l'église aux soldats.

Cependant les anciens abus allèrent si loin, que, sous les enfants de Louis-le-Débonnaire, les laïques établissoient des prêtres dans leurs églises, ou les chassoient, sans le consentement des évêques '. Les églises se partageoient entre les héritiers ; et quand elles étoient tenues d'une manière indécente, les évêques n'avoient d'autre ressource que d'en retirer les reliques ‘.

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Le capitulaire de Compiègne établit que l'envoyé du roi pourroit faire la visite de tous les monastères avec l'évêque, de l'avis et en présence

1 Comme il paroit par la note précédente, et par le capitulaire de Pepin, roi d'Italie, où il est dit que le roi donneroit en fief les monastères à teux qui se recommanderoient pour des fiefs. Il est ajouté à la loi des Lombards, liv. 111, tit. 1, § 30, et aux lois saliques, recueil des lois de Pepin, dans Échard, page 195, titre xxvi, article 4.

Voyez la constitution de Lothaire 1, dans la loi des Lombards, liv. 11, loi 1, § 43.

Ibid. § 44.

▲ Ibid.

* Donné la vingt-huitième année du règne de Charles-le-Chauve, l'an 868, édit. de Baluze, p. 203.

de celui qui le tenoit '; et cette règle générale prouve que l'abus étoit général.

la

Ce n'est pas qu'on manquât de lois pour restitution des biens des églises. Le pape ayant reproché aux évêques leur négligence sur le rétablissement des monastères, ils écrivirent à Charles-le-Chauve qu'ils n'avoient point été touchés de ce reproche, parce qu'ils n'en étoient pas coupables, et ils l'avertirent de ce qui avoit été promis, résolu et statué dans tant d'assemblées de la nation. Effectivement ils en citent neuf.

On disputoit toujours. Les Normands arrivérent, et mirent tout le monde d'accord.

CHAPITRE XII.

Établissement des `dîmes.

Les règlements faits sous le roi Pepin avoient plutôt donné à l'église l'espérance d'un soulagement qu'un soulagement effectif : et, comme Charles-Martel trouva tout le patrimoine public entre les mains des ecclésiastiques, Charlemagne trouva les biens des ecclésiastiques entre les mains

1 Cum concilio et consensu ipsius qui locum retinet.

2 Concilium apud Bonoilum, seizième année de Charles-le-Chauve, l'an 856, édit. de Baluze, p. 78.

des gens de guerre. On ne pouvoit faire restituer à ceux-ci ce qu'on leur avoit donné; et les circonstances où l'on étoit pour lors rendoient la chose encore plus impraticable qu'elle n'étoit de sa nature. D'un autre côté le christianisme ne devoit pas périr faute de ministres, de temples et d'instructions'.

Cela fit que Charlemagne établit les dimes; nouveau genre de bien qui eut cet avantage pour le clergé, qu'étant singulièrement donné à l'église, il fut plus aisé dans la suite d'en reconnoître les usurpations.

On a voulu donner à cet établissement des dates bien plus reculées : mais les autorités que l'on cite me semblent être des témoins contre ceux qui les allèguent. La constitution de Clotaire dit seulement qu'on ne leveroit point de certaines dimes sur les biens de l'église : bien loin donc

▲ Dans les guerres civiles qui s'élevèrent du temps de CharlesMartel, les biens de l'église de Reims furent donnés aux laiques. On laissa le clergé subsister comme il pourroit, est-il dit dans la vie de saint Remy. Surius, t. 1, p. 279.

2 Loi des Lombards, liv. 111, t. III, SI i et 2.

C'est celle dont j'ai tant parlé au chap. Iv ci-dessus, que l'on trouve dans l'édit. des capitulaires de Baluze, t. 1, art. 11, p. 9.

▲ Agraria et pascuaria, vel decimas porcorum, ecclesiæ concedimus; ita ut actor aut decimator in rebus ecclesiæ nullus accedat. Le capitulaire de Charlemagne, de l'an 800, édit. de Baluze, p. 336, explique très-bien ce que c'étoit que cette sorte de dime dont Clotaire exempte l'église; c'étoit le dixième des cochons que l'on mettoit dans les forêts du roi pour engraisser : et Charlemagne

que l'église levât des dîmes dans ces temps-là, toute sa prétention étoit de s'en faire exempter. Le second concile de Mâcon, tenu l'an 585, qui ordonne que l'on paye les dîmes, dit à la vérité qu'on les avoit payées dans les temps anciens; mais il dit aussi que, de son temps, on ne les payoit plus.

Qui doute qu'avant Charlemagne on n'eût ouvert la Bible et prêché les dons et les offrandes du Lévitique? Mais je dis qu'avant ce prince les dîmes pouvoient être prêchées, mais qu'elles n'étoient point établies.

J'ai dit que les réglements faits sous le roi Pepin avoient soumis au paiement des dîmes et aux réparations des églises, ceux qui possédoient en fief les biens ecclésiastiques. C'étoit beaucoup d'obliger, par une loi dont on ne pouvoit disputer la justice, les principaux de la nation à donner l'exemple.

Charlemagne fit plus; et on voit, par le capitulaire de villis, qu'il obligea ses propres fonds au paiement des dîmes : c'étoit encore un grand exemple.

veut que ses juges le paient comme les autres, afin de donner l'exemple. On voit que c'étoit un droit seigneurial ou économique. 1 Canone v, ex tomo 1, conciliorum antiquorum Galliæ, opera Jacobi Sirmundi.

2 Art. 6, édit. de Baluze, p. 332. Il fut donné l'an 800.

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