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AVIS1

Pour les motifs que nous avons expliqués dans la préface du premier volume, nous nous sommes abstenu autant que possible d'introduire au milieu des développements de notre histoire de la littérature latine de longs passages des auteurs: nous n'y avons usé que de très brèves citations pouvant aider à l'analyse et à l'appréciation de leurs œuvres. Reconnaissant toutefois qu'il ne serait pas inutile de placer sous les yeux du lecteur, à l'appui de notre critique, un certain nombre d'extraits plus étendus de chaque écrivain, nous nous sommes promis de fournir à la suite des trois volumes un recueil ordonné de morceaux, dont chacun, dans l'ouvrage, a toujours été annoncé à l'endroit précis auquel il se rapporte.

Au bas des pages de cet Appendice on ne trouvera pas beaucoup de notes. Ayant dit ce que nous avions à dire de la vie et des œuvres de chaque auteur, nous n'avons pas à nous répéter. Et puis, bien que traduire un si grand nombre d'extraits importants d'écrivains différents exige un travail considérable, nous avons cru devoir nous l'imposer, et une traduction, à laquelle nous avons apporté le plus grand soin, accompagne tous les textes.

L'ordre mème dans lequel se présentent ces textes donne au lecteur l'avantage de pouvoir facilement et rapidement passer en revue les évolutions successives de la langue et de la littérature latines.

Et à ce propos qu'une observation nous soit permise. De notre manière de procéder ne peut-il pas résulter pour les professeurs des classes supéricures de l'enseignement secondaire l'indication d'un moyen commode de donner à leurs élèves des séries de devoirs et d'explications alliant méthodiquement le travail habituel de la version au soin moins ordinaire de l'étude littéraire? I arrive trop souvent que des jeunes gens qui ont traduit du latin durant plusieurs années ne se rendent aucun compte de l'ensemble de la littérature latine. Cela tient à ce que, si on leur demande, chaque année, la traduction d'une quarantaine de pages d'écrivains divers, on les leur présente isolément, sans coordination, et avec le seul souci de varier la difficulté de cet excellent exercice. Mais si chacune de ces quarante versions était accompagnée d'une courte analyse de l'œuvre dont elle est tirée, et si toutes étaient choisies, dans un ordre chronologique, de manière à permettre des explications les reliant entre elles, le résultat ne serait-il pas tout autre ? Sans nuire en rien à l'effort des jeunes traducteurs, ne les munirait-on pas des notions littéraires que seul un enseignement méthodique et continu peut fournir ? Il nous semble que, dans les classes supérieures tout au moins, rien ne serait plus logique et plus aisé que de mener ainsi de front l'étude de la traduction et celle de l'histoire de la littérature se corroborant l'une l'autre.

(1) L'Appendice du présent ouvrage fait suite immédiatement à celui de l'ouvrage précédent. Il est conçu sur le même plan et formé de la mème manière. Je répète donc le mème avis sans rien y changer.

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CXCIII 1

Lettre d'Auguste à Livie au sujet de Claude.

Collocutus sum cum Tiberio, ut mandasti, mea Livia, quid nepoti tuo Tiberio faciendum esset ludis martialibus. Consensit autem uterque nostrum, semel nobis esse statuendum, quod consilium in illo sequamur. Nam si est άptios, et, ut ita dicam, éxλpos, quid est, quod dubitemus, quin per eosdem articulos et gradus producendus sit, per quos frater ejus productus fuit? Sin autem ἠλαττῶσθαι sentimus eum, και βεβλάφθαι, καὶ εἰς τὴν τοῦ σώ ματος, καὶ εἰς τὴν τῆς ψυχῆς ἀρτιότητα, præbenda materia deridendi et illum et nos non est hominibus, τὰ τοιαῦτα σκώπτειν καὶ μυκτηρίζειν ειωθέσι. Nam semper aestuabimus, si de singulis articulis temporum deliberabimus, ржzeiμevov iv, posse eum gerere honores arbitremur, nec ne. In præsentia tamen, quibus de rebus consulis, curare eum ludis martialibus triclinium sacerdotum, non displicet nobis, si est passurus, se ab Silani filio, homine sibi affini, admoneri, ne quid faciat, quod conspici et derideri possit Spectare eum circenses ex pulvinari, non placet nobis. Expositus enim in prima fronte spectaculorum conspicietur. In Albanum montem ire eum, non placet nobis, aut esse Romæ latinarum diebus. Cur enim non præficitur Urbi, si potest fratrem suum sequi in montem ? Habes nostras, mea Livia, sententias, quibus placet semel de tota re aliquid constitui, ne semper inter spem et metum fluctuemus. Licebit autem, si voles, Antoniæ quoque nostræ des hanc partem epistolæ hujus legendam.

August., Epist. ad Liv.

(1) L'Appendice de l'ouvrage précédent comprenant 192 morceaux, j'ai cru bon de désigner le premier morceau de celui-ci par le no CXCIII. Cette manière de procéder empêchera toute confusion dans les indications de la table générale des matières par ordre alphabétique que j'aurai à dresser lorsque sera terminé complètement le vaste travail que j'ai entrepris. (2) Tibère Claude.

(3) Mère de Claude.

CXCIII

(Tom. I, p. 162).

Je me suis entretenu avec Tibère, comme tu me l'as demandé, ma chère Livie, sur ce qu'il conviendra de faire de ton petit-fils Tibère aux fêtes de Mars. Tous deux nous avons été d'avis d'arrêter une fois pour toutes la ligne de conduite à suivre en ce qui le concerne. Car s'il est dans les conditions normales et, permets-moi l'expression, s'il est complet, pourquoi hésiterions-nous à le faire passer graduellement par les mêmes honneurs que son frère ? Si, au contraire, nous le trouvons d'une nature inférieure, d'une force de corps et d'esprit insuffisante, il ne faut pas donner l'occasion de rire et de nous et de lui aux gens qui ont coutume de se moquer et de s'égayer de ces sortes de choses. Nous serions toujours tourmentés si, à chaque période de sa vie, nous avions, faute d'un plan de conduite. tracé d'avance, à délibérer sur sa capacité ou son incapacité d'exercer les charges publiques. Dans la conjoncture présente cependant, pour répondre à ta demande, je ne m'oppose pas à ce qu'il préside la table des prêtres, aux fêtes de Mars, s'il veut se laisser diriger par le fils de Silanus, son parent, afin de ne rien faire qui puisse être remarqué ou tourné en ridicule. Je ne suis pas d'avis qu'il assiste aux jeux du cirque dans la loge impériale. Au premier rang il serait trop en vue. Je ne voudrais pas non plus qu'il allât sacrifier au mont Albain, ni qu'il fût à Rome pendant les fêtes latines; car pourquoi ne le mettrait-on pas à la tête de la Ville, s'il était capable d'accompagner son frère au mont Albain? Tu sais maintenant toute ma pensée, ma chère Livie, et le motif qui me fait croire qu'il faut régler une bonne fois la question qui le regarde, afin que nous ne flottions pas constamment entre l'espérance et la crainte. Tu pourras, si tu le veux, faire lire à notre chère Antonia cette partie de ma lettre.

CXCIV

Lettre d'Auguste à son petit-fils Caïus César.

IX kalend. Octobr. - Ave, mi Gai, meus ocellus jucundissimus: quem semper medius fidius desidero, cum a me abes; sed præcipue diebus talibus, qualis est hodiernus, oculi mei requirunt meum Gaium : quem, ubicunque hoc die fuisti, spero lætum et bene valentem celebrasse quartum et sexagesimum natalem meum. Nam, ut vides, xλuxxpα communem seniorum omnium tertium et sexagesimum annum evasimus. Deos autem oro, ut, quantumcunque superest temporis, id salvis vobis1 traducere liceat in statu reipublicæ felicissimo, άνδραγαθούντων ὑμῶν διαδεχο μένων stationem meam.

August., Epist. ad Gaium.

CXCV

Auguste à Tibère.

Ordinem æstivorum tuorum! Ego vero, mi Tiberi, et inter tot rerum difficultates, και τοσαύτην ῥαθυμίαν τῶν στρατευομένων, non potuisse quemquam prudentius gerere se, quam tu gesseris, existimo. Hi quoque, qui tecum fuerunt, omnes confitentur, versum illum in te posse dici :

Unus homo nobis vigilando restituit rem 2.

...Sive quid incidit, de quo sit cogitandum diligentius, sive quid stomachor, valde, medius fidius, Tiberium meum desidero succurritque versus ille Homericus:

:

Τούτου δ' ἐσπομένοιο, καὶ ἐκ πυρὸς αιθομένοιο
Αμφω νοστήσαιμεν, ἐπεὶ περίοιδε νοήσαι.

(1) Le pluriel, parce que ces derniers mots concernent en même tempsCaius et son frère Lucius.

(2) Auguste cite le vers d'Ennius en remplaçant le mot cunctando par vigilando.

CXCIV

(Tom. I, p. 164).

Le 9 des calendes d'octobre. Salut, mon cher Caïus, toi que j'aime si tendrement et dont l'absence est toujours pour moi un sujet de regret. C'est surtout en des jours. comme celui-ci que mes yeux cherchent partout mon Caïus. En quelque lieu que tu sois, j'espère que tu as célébré, joyeux et en bonne santé, le soixante-quatrième anniversaire de ma naissance. Car, tu le vois, j'ai échappé à cette année climatérique, la soixante-troisième, si redoutable à tous les vieillards. Mais, quelque temps qu'il me reste à vivre, je prie les dieux de faire en sorte que bien portants vous receviez de mes mains en un état prospère la république dont vous tiendrez en hommes de cœur les rênes après moi.

CXCV
(Tom. I, p. 168).

Quelle belle disposition dans ton camp d'été ! Pour moi, mon cher Tibère, en pensant aux mille difficultés de la situation et au peu d'élan de ceux que tu commandais, je suis d'avis que personne ne pouvait se conduire plus sagement que tu ne l'as fait. Ceux qui se trouvaient avec toi confessent tous qu'on doit t'appliquer cette citation : « Un seul homme par sa vigilance a rétabli nos affaires. >>

Me survient-il un embarras qui demande réflexion, un ennui quelconque, aussitôt, en vérité, je regrette mon Tibère, et ces vers d'Homère me reviennent à l'esprit : <<< Que cet homme soit avec moi et du milieu des flammes tous deux nous sortirons sains et saufs, tant il a de prudence ! »

Quand j'entends dire ou que j'apprends par tes lettres que l'excès du travail nuit à ta santé, que les dieux m'exter

(3) Iliad., X, v. 246.

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