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pôts. On se priverait de l'unique bien que ce luxe peut procurer, et du seul frein que, dans une constitution pareille, il puisse recevoir.

les

CHAPITRE XII.

De la liberté du commerce.

que

dans

La liberté du commerce n'est pas une faculté accordée aux négocians de faire ce qu'ils veulent, ce serait bien plutôt sa servitude: ce qui gêne le le commerçant ne gêne pas pour cela le commerce. C'est dans les pays de la liberté que le négociant trouve des contradictions sans nombre; et il n'est jamais moins croisé par les lois de la servitude. L'Angleterre défend de faire sortir ses laines; elle veut que le charbon soit transporté par mer dans la capitale; elle ne permet point la sortie de ses chevaux s'ils ne sont coupés; les vaisseaux (a) de ses colonies qui conmercent en Europe doivent mouiller en Angleterre. Elle gêne le négociant, mais c'est en faveur du commerce.

pays

(a) Acte de navigation de 1660. Ce n'a été qu'en temps de guerre que ceux de Boston et de Philadelphie ont envoyé leurs vaisseaux en droiture jusque dans la Méditerranée porter

leurs denrées.

CHAPITRE XIII.

Ce qui détruit cette liberté.

Là où il y a du commerce il y a des douanes. L'objet du commerce est l'exportation et l'importation des marchandises en faveur de l'état; et l'objet des douanes est uu certain droit sur cette même exportation et importation, aussi en faveur de l'état. Il faut donc que l'état soit neutre entre sa douane et son commerce, et qu'il fasse en sorte que ces deux choses ne se croisent point; et alors on y jouit de la liberté du commerce.

La finance détruit le commerce par ses injustices, par ses vexations, par l'excès de ce qu'elle impose; mais elle le détruit encore indépendamment de cela par les difficultés qu'elle fait naître, et les formalités qu'elle exige. En Angleterre, où les douanes sont en régie, il y a une facilité de négocier singulière : un mot d'écriture fait les plus grandes affaires; il ne faut point que le marchand perde un temps infini et qu'il ait des commis exprès pour faire cesser toutes les difficultés des fermiers, ou pour s'y soumettre.

CHAPITRE XIV

Des lois de commerce qui empórtent la confiscation
des marchandises.

La grande chartre des Anglais défend de saisir et de confisquer, en cas de guerre, les marchandiscs des négocians étrangers, à moins que ce ne soit par représailles. Il est beau que la nation. anglaise ait fait de cela un des articles de sa liberté.

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Dans la guerre que l'Espagne eut contre les Anglais en 1740, elle fit une (a) loi qui punissait de mort ceux qui introduiraient dans les états d'Espagne des marchandises d'Angleterre; elle infligeait la même peine à ceux qui porteraient dans les états d'Angleterre des marchandises d'Espagne. Une ordonnance pareille ne peut, je crois, trouver de modèle que dans les lois du Japon. Elle choque nos mœurs, l'esprit de commerce, et l'harmonie qui doit être dans la proportion des peines; elle confond toutes les idées, faisant un crime d'état de ce qui n'est qu'une violation de police.

(a) Publiée à Cadix au mois de mars 1740.

CHAPITRE XV.

De la contrainte par corps.

Solon (a) ordonna à Athènes qu'on n'obligerait plus le corps pour dettes civiles. Il tira (b) cette loi d'Egypte; Boccoris l'avait faite, et Sésostris. l'avait renouvelée.

Cette loi est très-bonne pour les affaires (c) civiles ordinaires; mais nous avons raison de ne point l'observer dans celles du commerce. Car les négocians étant obligés de confier de grandes sommes pour des temps souvent fort courts, de les donner et de les reprendre, il faut que le débiteur remplisse toujours au temps fixé ses engagemens; ce qui suppose la contrainte par corps.

Dans les affaires qui dérivent des contrats civils ordinaires, la loi ne doit point donner la contrainte par corps, parce qu'elle fait plus de cas de la liberté d'un citoyen que de l'aisance d'un autre. Mais, dans les conventions qui dérivent du commerce, la loi doit faire plus de cas de l'ai

(a) Plutarque, au traité, Qu'il ne faut point emprunter à

usure.

(b) Diodore, liv. I, part. II, chap. III.

(c) Les législateurs grecs étaient blâmables, qui avaient défendu de prendre en gage les armes et la charrue d'un homme et permettaient de prendre l'homme même. Diodore, liv. L, part. II, chap. III.

sance publique que de la liberté d'un citoyen; ce qui n'empêche pas les restrictions et les limitations que peuvent demander l'humanité et la bonne police.

CHAPITRE XVI.

Belle loi.

La loi de Genève qui exclut des magistratures et même de l'entrée dans le grand conseil les enfans de ceux qui ont vécu ou qui sont morts insolvable, à moins qu'ils n'acquittent les dettes de leur père, est très-bonne. Elle a cet effet, qu'elle donne de la confiance pour les négocians; elle en donne pour les magistrats; elle en donne pour la cité même. La foi particulière y a encore la force de la foi publique.

CHAPITRE XVII.

Loi de Rhodes.

Les Rhodiens allèrent plus loin. Sextus Empiricus (a) dit que chez eux un fils ne pouvait se dispenser de payer les dettes de son père en re

(a) Hypotyposes, liv. I, chap. xiv.

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