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ACADÉMIE DES ÉTUDES.

Regia solis erat sublimibus alta columnis
Clara micante auro flammasque imitante Pyropo.

« Je préfère, disait Pierre-le-Grand, en visitant l'hôtel des Invalides de Paris, je préfère un pareil édifice au gain d'une bataille rangée. » Le magnifique palais de Naples, appelé Académie des études, serait digne d'une semblable réflexion; c'est aussi un hôtel des Invalides, où les statues mutilées des dieux et des héros ont trouvé un somptueux asile.

Tanucci, ministre de Charles III, eut l'honneur de fonder cette académie savante, chargée spécialement de déchiffrer les manuscrits d'Herculanum. Aucune description ne peut donner l'idée de l'ingénieux procédé dont on se sert pour développer en feuilles

minces les rouleaux de papirus où sont contenus les écrits de la docte antiquité, et que l'action des laves vésuviennes a entièrement carbonisés. Plus on considère ce prodige d'adresse, de patience et d'habileté, plus on l'admire; car il consiste à faire sortir d'un morceau de charbon la pensée humaine. Je suis resté pendant une heure, cloué à ma place, devant ce spectacle.

Si le dieu des beaux-arts descendait une seconde fois sur la terre, il choisirait pour sa demeure l'Académie des études; là il aurait sous la main les chefs-d'œuvre qu'il inspira à ses artistes de prédilection; là sont debout, étalés dans une suite de splendides appartemens, les marbres vivans qu'on a fait sortir des entrailles de la terre, où ils étaient enfouis depuis deux milles années; comme si l'homme, que les dieux ont, selon les fables, si souvent ressuscité, avait voulu prendre sa revanche avec eux, en les faisant sortir de leurs tombes. Là sont étalés dans un ordre parfait tous

les objets servant à tous les besoins, à tous les plaisirs des anciens, et qui nous révèlent leurs usages, leurs mœurs, en un mot leur vivre.

Il faudrait entasser volume sur volume, je ne dis pas pour décrire, mais seulement pour compter les trésors de ce vaste musée, dont les villes de Pompéi, d'Herculanum et de Pestum sont tributaires.

Une salle où se trouve une collection de marbres qui représentent les écarts de la volupté délirante des anciens, pique la curiosité des voyageurs. A mon grand étonnement, j'y vis pénétrer plusieurs femmes, quoiqu'une inscription les avertît de laisser, en entrant, la pudeur sur le seuil de la porte. Une jeune anglaise entr'autres, pressait des plus vives questions son chevalier elle ne faisait grâce à aucune statue, à aucun simulacre. Elle s'arrêta immobile devant un satyre et une chèvre, dont l'attitude rappelle le torvis tuentibus hirci. Est-ce que c'était,

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dit-elle, un usage des anciens? Voilà donc ces beautés britanniques qui, s'effarouchant au moindre mot, semblent avoir des sensitives dans l'oreille! comme elles s'aguerrissent en Italie!

Voulant aujourd'hui m'occuper spécialement de Pestum, je n'ai donné une attention particulière qu'aux objets trouvés dans les tombeaux et dans les ruines de cette ville grecque. J'avais vu gravés tous ces objets dans les ouvrages qui traitent de Pestum; j'ai admiré l'exactitude des auteurs qui, ne s'étant point laissé emporter par leur imagination, ont peint les vénérables débris d'antiquité tels qu'ils existent. Les armures trouvées à Pestum dans les tombeaux, couvertes de moisissure et de rouilles verdâtres, sont disposées élégamment et en forme de trophées, aux quatre angles de la salle. Mon âme éprouvait une espèce de contraction en les considérant; elle était comme oppressée du poids des siècles, qui semblaient avoir

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